L’héritage de la presse écrite et de la radio

lundi 7 septembre 2015
par  Froissart
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Dans la culture des Français du milieu du XXème siècle, la radio joue un rôle de premier plan. Une popularité que l’appareil d’Etat a su utiliser notamment dans le cours de la Seconde guerre mondiale.

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Tout comme le poste de radio, le téléviseur est un meuble imposant.
Publicité datant de 1965.

On y trouve déjà très structurés les grands domaines que la télévision va couvrir peu à peu comme l’information et la distraction. La « réclame » sur les ondes, la figure charismatique de certains animateurs-vedettes sont devenus, par exemple, des éléments familiers. La notion de grille de programme, de direct existe. La concurrence entre les différentes stations impose la programmation d’émissions susceptibles de fidéliser les auditeurs. Les feuilletons radiophoniques remplissent en partie cette fonction. La famille Duraton sur Radio Cité, Ça va bouillir avec Zappy Max sur Radio-Luxembourg et Signé Furax de Pierre Dac et Francis Blanche sur Europe n°1 sont restés dans les mémoires.

La presse écrite, depuis plus longtemps encore, a exploité le filon du « roman à suivre » pour s’assurer des ventes stables. C’est même à elle que l’on doit la création du feuilleton comme genre littéraire dans les années 1840.

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Rocambole fait peau neuve avec Jean-Pierre Decourt comme réalisateur.
DVD commercialisé en 2005 par l’éditeur Koba films dans la collection Mémoire de la télévision.

Il est associé à d’illustres signatures : Honoré de Balzac, Alexandre Dumas, Eugène Sue, Hector Malot, Paul Féval, Ponson du Terrail. Ce n’est pas sans raison que la télévision va puiser dans ce répertoire pour donner naissance à de nombreux feuilletons : Rocambole, en 1964 d’après Ponson du Terrail, Le Chevalier de Maison-Rouge en 1963, Les compagnons de Jéhu, en 1966 et Lagardère, en 1967 d’après Alexandre Dumas, Les habits noirs en 1967, d’après Paul Féval.

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Le Chevalier de Maison-Rouge réalisé par Claude Barma : Anne Doat côtoie Michel Le Royer, Dominique Paturel et Jean Desailly.
Télé 7 jours n°154, mars 1963

Il est une autre forme d’expression liée à la presse et très prisée dans les années 1960, le roman-photo, qui participe de cet objectif de rendre captif le lecteur. Avec le roman-photo, on peut établir un pont avec la bande dessinée qui a d’ailleurs pu assumer la même fonction dans les journaux et les magazines grand public. Ceci ne nous éloigne pas du tout de Thierry la Fronde car, entre autres produits dérivés, on a utilisé ces deux supports pour matérialiser la présence de notre héros sur d’autres média que la télévision.

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La BD en couleur est là pour prendre le relais du feuilleton en noir et blanc.
Extrait de la BD créditée à Lucien Nortier parue dans le journal de Mickey.

La durée des feuilletons est étudiée en fonction des impératifs de la grille de programmation. C’est donc le format qui s’adapte à la grille de programmation et non le contraire. Pour ce qui concerne la télévision, Janique Aimée et Le temps des copains, sont diffusés sur une durée de treize minutes. Ils sont calés juste avant le journal télévisé du soir. Par contre, Le Chevalier de Maison-Rouge passera à l’antenne en mars 1963 sous la forme de quatre épisodes de quatre-vingt-dix minutes. Thierry la Fronde est le rendez-vous dominical de 19h30.

Nous devons une précision sur le format de Thierry la Fronde à Pierre Houdain qui a été pour Télé France le chef-monteur de Thierry la Fronde :

Les formats qui s’incluent dans une grille de programme durent une heure ou trente minutes. On faisait des vingt-six minutes ou des cinquante-deux minutes pour laisser la place à la publicité, je précise que c’était pour pouvoir les commercialiser à l’étranger car ce n’était pas des obligations que nous demandait la RTF à l’époque.

Pierre Houdain, chef-monteur chez Telfrance

Et pour cause, puisqu’en 1963, la publicité n’est pas encore permise à l’antenne.
En tant qu’auteur, c’est à Jean-Claude Deret qu’il revient de réussir à ajuster la durée de chaque épisode :

Je trouve que le calibrage de Thierry la Fronde réglé sur une demi-heure s’accorde avec le fait que c’est aussi la durée d’un acte au théâtre. Pour estimer la durée de mes épisodes, dès le début, je chronométrais, je visualisais. C’est mon expérience d’acteur qui me le permettait, je jouais la scène. A peu de choses près, cela correspondait. De toute façon, les scènes de combat, de cavalcade pouvaient s’ajuster sur quelques secondes de plus ou de moins. C’est le montage, ensuite, qui jouait. C’est ma culture cinématographique, les jeunes cinéastes aussi que j’ai connus qui ont formé mon bagage initial.

Jean-Claude Deret, auteur.

Si l’on peut parler à propos du feuilleton de "genre littéraire", c’est que les conditions de publication dans les journaux quotidiens ont imposé des codes particuliers dans la conception de ces formes courtes et à suivre. On retrouve cette spécificité d’écriture dans la réalisation des feuilletons télévisés. On peut dire que Thierry la Fronde s’est montré inventif dans ce domaine. De par sa position de défricheur et du fait, entre autres, des talents de Jean-Claude Deret poussé dans ses retranchements par les impératifs de la production.